0
Revue juridique

Coupe du monde des clubs de la FIFA 2025 : quels enjeux juridiques ?

par
EAJF / A. CHABOT
le
12/12/24

Jeudi 5 décembre 2024, la ville de Miami (États-Unis) a accueilli le tirage au sort de la nouvelle compétition de la FIFA : la Coupe du monde des clubs 2025. Lors de cette journée, ont notamment été tirés les adversaires du PSG : l’Atletico Madrid, Botafogo et les Seattle Sounders.

Cette nouvelle compétition, qui existait déjà dans un format plus restreint, représente un véritable bouleversement juridico-sportif.

Si, historiquement, la FIFA demeure la fédération sportive internationale en charge de l’organisation de la Coupe du monde de football opposant des sélections nationales, son intérêt pour organiser des compétitions entre clubs remonte à l’année 2000.

Toutefois, la création de la compétition sous l’appellation « Championnat du monde des clubs » en 2000 demeurait particulièrement modeste avec seulement 8 participants. Sa nouvelle version 2025 devient plus attractive : nouveau format à 32 clubs, nouvelles recettes avec 60 millions d’euros de dotation prévue par club et de nouvelles règles.  

Ces dernières, adoptées au sein du règlement de la Coupe du monde des clubs (ci-après « règlement de la CMC ») nous donne l’occasion de revenir sur les principaux enjeux juridiques de cette nouvelle compétition internationale de football.

Une nouvelle période de mercato pré-Coupe du monde des clubs :

La Coupe du monde des clubs de la FIFA 2025 va bouleverser le marché des transferts 2025 du fait de son positionnement au calendrier.

En effet, la nouvelle compétition ayant lieu du 15 juin 2025 au 13 juillet 2025 se déroule sur la période classique du mercato d’été qui se tient du 1er juillet au 30 août.

En ce sens, l’article 22.4 du règlement de la CMC permet d’établir une période d’enregistrement supplémentaire de 10 jours pré-Coupe du monde des clubs : du 1er au 10 juin 2025, permettant aux clubs d’anticiper leur recrutement avant le début de la compétition.


Une exception au principe de la mise à disposition des internationaux :

En principe, l’article 1.1 de l’annexe n°1 du règlement du statut et du transferts des joueurs (ci-après « RSTJ ») prévoit un principe de mise à disposition des joueurs internationaux lorsque ceux-ci sont convoqués par leur sélection : « Tout accord contraire entre un joueur et un club est interdit. »

Ce principe vaut pour les périodes de matchs internationaux, mais également pour la Coupe du monde et les championnats continentaux (Euro, Nations League...).  

Toutefois, dans le cadre de sa Coupe du monde des clubs, la FIFA vient déroger à ce principe de mise à disposition : « pendant la durée de la compétition, les clubs participants ne sont pas tenus de mettre leurs joueurs enregistrés à disposition des équipes représentatives du pays qu’ils sont en droit de représenter » (article 22.5 du règlement de la CMC).

Par ailleurs, en raison de la tenue de cette nouvelle Coupe du monde, certaines compétitions ont été reportées. Ainsi, la Coupe d’Afrique des Nations 2025 (« CAN ») aura lieu à l’hiver 2026 (Communiqué de presse en date du 21 juin 2024).

L’accord de participation pour la CMC, un accord contractuel ?

Différence de taille avec le règlement de la coupe du monde entre sélections nationales, les clubs participants doivent s’engager par le biais d’un accord de participation (article 4.1 du règlement de la CMC).

Cet accord de participation est essentiellement requis par la différence de nature liant la FIFA et les équipes participantes :

- Lors de la Coupe du monde, les sélections nationales sont les équipes représentantes des associations membres de la FIFA : il existe donc un lien direct entre les deux parties pouvant faire l’objet de sanctions disciplinaires de la part de la FIFA dans le cadre du droit commun des statuts et des règlements de la FIFA.

- Lors de la Coupe du monde des clubs, les clubs participants ne sont pas membre de la FIFA, mais des clubs affiliés aux associations membres de la FIFA. Cela nécessitait dès lors un document de nature contractuel liant les deux parties et prévoyant spécifiquement des sanctions disciplinaires.  

En ce sens, l’accord de participation impose la participation du club à la compétition et prévoit des sanctions en cas de retrait de la compétition en fonction du délai de rétractation :

- En cas de retrait plus de 30 jours avant la compétition, le club risque une amende de 250 000 francs suisses,  

- En cas de retrait de moins de 30 jours avant le début de la compétition, le club risque une amende de 500 000 francs suisses.

Une telle sanction aurait pu concerner le Real Madrid C.F., dont l’entraîneur Carlo Ancelotti avait indiqué lors d’une interview que son club ne participerait pas à la compétition. Cette hypothèse a cependant été écartée par un communiqué officiel du club, qui précise que « sa participation à la nouvelle Coupe du monde des clubs, qui sera organisée par la FIFA lors de la saison prochaine 2024/2025, n'a [jamais] été remise en question » (Communiqué officiel du Real Madrid C.F. du 10/06/2024).



Par ailleurs, l’accord de participation impose une obligation pour les clubs participants d’« aligner leur meilleure équipe possible tout au long de la compétition ». Sur ce point, il est possible de s’interroger sur la portée d’une telle obligation : est-elle réellement sanctionnable par la commission disciplinaire de la FIFA ? Sur quel critère la FIFA peut-elle déterminer la meilleure équipe possible ?

Résolution des litiges, la compétence du TAS :

L’article 7.1 du règlement de la CMC de la FIFA 2025 prévoit le recours de principe à l’arbitrage du Tribunal arbitral du sport (ci-après « TAS »).

Sur ce fondement, le TAS pourra créer une chambre ad hoc comme elle le fait pour les grandes compétitions européennes et internationales de football (Euro 2024 en Allemagne, Coupe du monde 2022 au Qatar).

Multipropriété, nouvelle compétence de la FIFA :

Traditionnellement traitée par l’UEFA dans le cadre de ses compétitions européennes interclubs (UEFA Champions League, UEFA Europa League, UEFA Conference League), la FIFA, en ouvrant la Coupe du monde des clubs à 32 équipes, se devait de protéger l’intégrité de la compétition en adoptant des règles relatives à la multipropriété.

Ainsi, l’article 10 du règlement de la CMC 2025 prévoit l’interdiction de la détention directe ou indirecte de deux clubs participant à la compétition.

Dans l’hypothèse où deux clubs participant à la compétition seraient détenus où contrôler par la même entité, la commission de discipline de la FIFA pourra décider l’exclusion d’un des clubs.

La création de la compétition contestée par l’UNFP

L’introduction de la Coupe du monde des clubs dans le calendrier de la FIFA a été vivement contestée par des syndicats de footballeurs, notamment la FIFPRO Europe, l’UNFP, et l’association anglaise des footballeurs professionnels (PFA : Professionnal Footballers Association).

Le 13 juin 2024, les trois syndicats ont saisi conjointement le tribunal de commerce de Bruxelles afin qu’une question préjudicielle soit posée à la Cour de justice de l’Union européenne (« CJUE »).

Les syndicats considèrent notamment que l’inscription de cette compétition au calendrier international de la FIFA comme contraire aux droits fondamentaux des travailleurs garantis par la Charte des droits fondamentaux de l’UE violant le droit à des conditions de travail garantissant la santé et le droit à une période annuelle de congés payés.  

Par exemple, pour le Paris Saint-Germain, l’introduction d’une telle compétition pourrait, conduire certains joueurs à disputer au maximum près de 74 rencontres.  

Récapitulatif :

- Coupe de France : 5 rencontres du 16e de finale à la finale

- UEFA Champions League : 8 rencontres de phase de ligue, 2 rencontres de rencontre de repêchage, 7 rencontres de phase à élimination directe des huitièmes jusqu’à la finale

- Sélections nationales : 5 fenêtres de 2 matchs : septembre, octobre, novembre, mars, juin (Calendrier international des matchs pour le football masculin)

Conclusion :

La création de la Coupe du monde des clubs soulève de nombreuses questions.  

Si elle demeure un vecteur d’attractivité pour les clubs avec de nouvelles recettes, de nouveaux matchs et de nouveaux fans à conquérir, pour les joueurs la limite semble être consommée :

- Faut-il désormais inscrire une limite fixe de match que chaque joueur pourrait disputer chaque saison ?

- La création de cette compétition est-elle conforme aux droits des sportifs professionnels ?

Le recours entamé par les syndicats des joueurs permettra de répondre à ces différentes questions et de situer la limite à la création de nouvelles compétitions par les instances du football mondial.