Ces articles sont renforcés par l'article 7, qui pose un principe général de non-discrimination fondée sur la nationalité. Cette affaire pose la question de savoir dans quelle mesure les régulations sportives nationales peuvent être compatibles avec les dispositions du droit communautaire, en particulier lorsqu'elles imposent des restrictions d’accès en fonction de la nationalité.
En l’espèce, M. Mantero (ancien) président du Football Club de Rovigo, avait demandé à M. Donà de recruter un nouveau joueur pour l’équipe italienne. Pour ce faire, M. Donà avait diffusé une annonce dans un journal sportif en Belgique. À la suite de cette publication, plusieurs joueurs étrangers, dont des Belges, avaient exprimé leur intérêt. Toutefois, M. Mantero décida de ne pas prendre en compte leurs candidatures, jugeant que recruter des joueurs étrangers violerait les règles de la Fédération Italienne de Football.
Par ailleurs, M. Donà se sentant lésé par cette décision, a saisi la justice italienne, qui a par la suite posé plusieurs questions préjudicielles à la Cour de Justice des Communautés Européennes (« CJCE »). Les questions portaient sur l'application du principe de libre circulation des travailleurs et de non-discrimination dans le sport au sein de l’Union Européenne.
La CJCE a d'abord rappelé que les articles 48 et 59 du Traité de Rome garantissent respectivement la libre circulation des travailleurs et la libre prestation de services au sein de la Communauté européenne.
Ainsi, l'article 48 du Traité de Rome (devenu l’article 45 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne « TFUE »), dispose que tout travailleur, y compris un joueur de football professionnel, doit pouvoir exercer son métier dans n’importe quel État membre de l’Union Européenne sans être discriminé en raison de sa nationalité. Le joueur étranger doit avoir les mêmes droits que les ressortissants nationaux pour être employé et affilié à un club de football.
En ce sens, la Cour a considéré que le règlement de la Fédération Italienne de Football, en restreignant l'accès aux compétitions officielles aux joueurs italiens, viole cette disposition. En effet, les joueurs étrangers sont aussi des travailleurs au sens du droit communautaire et, en vertu de l’article 48, ils ne peuvent être exclus des clubs professionnels en raison de leur nationalité.
L'article 59 (devenu l’article 56 du TFUE) élargit la protection en interdisant toute discrimination dans la prestation de services au sein de l’Union. Les joueurs de football, lorsqu'ils offrent leurs services à un club étranger, entrent dans le champ d’application de cet article. Dans l'affaire Donà c/ Mantero, les joueurs étrangers qui avaient répondu à l’offre d’emploi de M. Donà pour jouer en Italie offraient leurs services sportifs. L’exclusion des joueurs étrangers par la Fédération Italienne de Football constitue une violation de ce droit de prestation de services.
Ainsi, la CJCE a confirmé que les règles sportives, même si elles relèvent de la compétence d'organisations privées comme les fédérations, ne peuvent pas violer ces principes de droit communautaire sans justification valable.
L'article 7 (devenu l’article 18 du TFUE) vient instaurer un principe général de non-discrimination sur la base de la nationalité dans toutes les situations régies par les traités européens. Cet article sert de fondement juridique général à l'interdiction des discriminations dans l’ensemble des secteurs, y compris le sport.
Dans cette affaire, la CJCE a souligné que les dispositions du règlement de la Fédération Italienne de Football sont une forme de discrimination directe fondée sur la nationalité. L'article 7 garantit que les ressortissants des autres États membres doivent être traités de manière équivalente aux nationaux, sauf dans des cas spécifiques où des objectifs légitimes peuvent justifier une dérogation.
L'arrêt Donà c/ Mantero reconnaît cependant que certaines dérogations peuvent exister, mais elles doivent être strictement encadrées. La Cour se réfère à l'arrêt Walrave et Koch en 1974, qui a introduit la possibilité de dérogations pour des raisons strictement sportives, notamment dans la composition des équipes nationales. Ces dérogations ne doivent pas être motivées par des raisons économiques, mais plutôt par des besoins sportifs tels que la participation à des compétitions internationales où l'identité nationale est en jeu.
Cela dit, concernant l’arrêt Donà, la CJCE a estimé que la restriction imposée par la Fédération Italienne de Football, visant à limiter l'accès aux compétitions officielles aux seuls joueurs italiens, n'est pas justifiée par un objectif sportif légitime, car elle concerne toutes les compétitions nationales et non uniquement des rencontres spécifiques de représentation nationale.
Cet arrêt a eu un impact majeur sur les régulations sportives des fédérations nationales, les obligeant à adapter leurs règlements pour qu’elles soient conformes au droit communautaire. Les fédérations sportives ne peuvent plus, à présent, imposer des restrictions d’affiliation fondées sur la nationalité, sauf en cas de justification légitime non liée à des raisons économiques. Cette décision a renforcé les droits des joueurs étrangers dans les compétitions nationales, favorisant une plus grande mobilité au sein de l’Union européenne.
L’arrêt Donà c/ Mantero marque une certaine évolution du droit communautaire dans le sport et a ouvert la voie à d’autres décisions clés, telles que l'arrêt Bosman en 1995. En effet, l’arrêt Bosman a poursuivi la logique de non-discrimination et de libre circulation des joueurs, notamment en abolissant les indemnités de transfert pour les joueurs en fin de contrat et en supprimant les quotas de joueurs étrangers dans les clubs. Ces réformes ont contribué à la libéralisation du marché du travail dans le secteur sportif et à une plus grande intégration du sport dans le marché européen.
L'arrêt Donà c/ Mantero met en lumière la compatibilité des régulations sportives avec les principes fondamentaux du droit communautaire. Il affirme que, même si le sport possède des spécificités, les fédérations sportives ne peuvent imposer des discriminations fondées sur la nationalité, sauf en cas de raisons strictement sportives, comme les compétitions internationales. En appliquant les articles 7, 48 et 59, la CJCE a posé les bases de la libre circulation des joueurs dans l’Union Européenne, contribuant ainsi à une harmonisation des régulations sportives avec le droit communautaire.