Ce lundi 2 décembre 2024, l’IFAB (International Football Association Board), instance en charge des lois du jeu, a approuvé l’élargissement des essais du FVS (Football Video Support), qui est le système de soutien vidéo au football. Cette nouvelle mesure offre désormais aux entraîneurs la possibilité de contester les décisions arbitrales avec un système de challenge vidéo, ouvrant ainsi la voie à une évolution majeure dans la gestion de l’arbitrage.
Pour autant, cette introduction d’un droit de contestation des décisions par les entraîneurs est-elle une avancée pour l’équité sportive, ou bien un risque de déséquilibre du jeu ?
La VAR, introduite pour la première dans un match en décembre 2016, est aujourd’hui un élément indispensable dans un match, et aide ainsi les arbitres à prendre des décisions plus justes par le visionnage de l’action.
La VAR rend des décisions uniquement pour 4 types d’incidents, cela va d’un but, afin de déterminer s’il est validé ou non, un penalty qui doit être sifflé ou non, un carton rouge à donner ou non, et enfin sur la vérification de l’identité d’un joueur à avertir ou exclure.
L’assistance vidéo à l’arbitrage intervient lorsqu’un incident se produit, et qu’une erreur claire et évidente est à relever, au cours d’un match, et dans deux circonstances. Dans la première, l’arbitre estime qu’il a besoin de plus de précisions et d’éclaircissements sur l’action, il peut alors demander la vérification aux arbitres assistants vidéos. Ou bien, parfois, ce sont directement les arbitres de la VAR qui informent directement l’arbitre sur le terrain qu’une action doit être analysée. Les arbitres assistants vidéos indiquent donc ce que la vidéo montre et transmettent directement le verdict à l’arbitre de terrain. Ce dernier a également la possibilité d’aller vérifier de lui-même la vidéo avant de prononcer la décision.
Ce système, très souvent critiqué pour interrompre le jeu et supprimer l’élément humain dans la prise de décision, reste néanmoins un outil mis en place pour rendre le sport plus juste et plus sûr, même si les conclusions VAR sont très souvent susceptibles d’interprétation.
Étant le sport le plus populaire dans le monde, se jouant sur tous les continents, dans tous les pays et ce quel que soit le niveau, les lois de jeu doivent être homogènes sur tous les terrains. Le football est donc encadré juridiquement et les lois actuelles du jeu sont édictées par l’IFAB, l’International Football Association Board, constitué des quatre associations de football britanniques, disposant d’une voix chacune, et de la FIFA qui représente les 207 associations restantes, et qui dispose donc de quatre voix.
Les lois de jeu régies par cet organisme doivent contribuer à la sécurité et au bien-être des joueurs. Ce dernier a donc la responsabilité de réagir rapidement et de manière appropriée lorsque le besoin s’en fait ressentir pour que le texte des Lois de jeu soit toujours en adéquation avec les évolutions de la société, et qu’il protège l’ensemble des participants.
Pour que les lois répondent toujours au bien-être des joueurs, et que l’ensemble des associations prenant part au processus décisionnel soient convaincus des bienfaits éventuels de cette nouvelle règle, des tests sont régulièrement organisés. L’objectif de l’IFAB est de garder un dialogue constructif avec l’ensemble des acteurs du football mondial, pour que les modifications apportées dans les lois du jeu profitent à tous les niveaux, et partout dans le monde.
L’IFAB se concentre sur certains points essentiels lors de la rédaction des nouvelles règles, qui sont l’équité, l’intégrité, le respect, la sécurité, le plaisir des participants et des spectateurs, et l’utilisation de la technologie au bénéfice du football.
C’est donc dans ce contexte, que l’IFAB a élargi sa phase de test pour intégrer aux lois du jeu la possibilité de contestation des entraîneurs face à des décisions de la VAR. Concrètement, il s’agit de l’ajout d’un système alternatif à la VAR, le Football Video Support (FVS), à destination des entraîneurs, et cela offrirait donc aux entraîneurs la possibilité d’invalider une décision arbitrale prise au cours du match.
Cette mesure avait déjà été validée par l’IFAB en mars 2024, et avait pu être testée lors des Coupes du Monde féminines U20 et U17 de la FIFA organisées cette année. Les essais ne sont encore qu’au début, et les retours d’expériences durant ces deux compétitions seront minutieusement analysés, afin de déterminer les points à améliorer de cette mesure.
L’introduction d’un droit de contestation des décisions arbitrales par les entraîneurs via le système FVS marque une transformation majeure des règles du football. Traditionnellement, ce sport repose sur l’autorité quasi absolue de l’arbitre, inscrite dans les lois du jeu. L’ajout de cette possibilité remet en question ce principe, en instituant un mécanisme d’intervention des entraîneurs, qui jusqu’ici n’avaient pas de rôle direct dans le processus décisionnel des matchs. Il est pertinent de souligner que l’installation du FVS ne viendra pas remplacer la VAR, mais interviendra en complément.
L’impact sur les règles est double : d’une part, il redéfinit le fonctionnement de l’arbitrage en introduisant un cadre procédural précis pour ces contestations. D’autre part, il soulève des questions sur les décisions qui peuvent ou non faire l’objet de contestations (exemple : buts, penalty, expulsions). Cette réforme nécessitera une mise à jour des lois du jeu par l’IFAB, ainsi que des formations spécifiques pour les arbitres, afin de s’assurer que ce nouveau processus s’intègre harmonieusement au déroulement des matchs. Enfin, les conséquences sur le rythme du jeu, élément crucial dans le football, devront être soigneusement étudiées pour éviter de nuire à la fluidité du sport.
En octroyant aux entraîneurs le pouvoir de contester des décisions arbitrales, et ce deux fois par rencontre maximum, une nouvelle dynamique de responsabilités apparaît. Si ce droit est mal utilisé, par exemple pour retarder le jeu ou perturber la concentration de l’équipe adverse, des sanctions pourraient être envisagées. Juridiquement, les instances dirigeantes devront définir des règles claires encadrant ce droit, y compris les conditions dans lesquelles il peut être exercé et les sanctions applicables en cas d’abus.
Pour éviter une multiplication des contestations, des limites devront être imposées, à l’instar d’autres sports comme le tennis ou le cricket, où les équipes disposent d’un nombre défini de « challenges ». Une approche similaire pourrait être adoptée dans le football, avec un ou deux droits de contestation par match, uniquement en cas d’incertitude majeure. Cela garantirait que le recours à ce système reste exceptionnel et n’entrave pas le rythme du jeu.
Ce changement nécessitera une révision approfondie des règlements internationaux, tant au niveau de la FIFA que des fédérations nationales. En effet, l’application uniforme d’une telle mesure est essentielle pour garantir l’équité entre compétitions internationales et locales. Cependant, des tensions pourraient surgir entre les juridictions locales, qui pourraient avoir des approches divergentes, et les règles internationales dictées par la FIFA.
Cette réforme soulève également des questions d’équité. Les clubs disposant de ressources humaines et technologiques avancées pourraient mieux analyser les actions en temps réel et contester efficacement, ce qui pourrait creuser l’écart entre les équipes. Par ailleurs, les interruptions provoquées par les contestations pourraient briser le rythme du jeu, offrant un avantage stratégique involontaire à certaines équipes. Il sera crucial d’assurer un cadre de régulation strictpour éviter ces déséquilibres.
L’idée d’un droit de contestation vidéo par les entraîneurs n’est pas nouvelle et s’inspire de pratiques existant déjà dans d’autres sports. Par exemple, le tennis utilise le système « Hawk-Eye » pour vérifier les décisions concernant les balles litigieuses, et le cricket permet aux capitaines de demander une révision des décisions arbitrales via le « Decision Review System » (DRS). Ces sports ont établi des règles précises, notamment un nombre limité de challenges, et des critères spécifiques pour leur utilisation.
Cependant, le football possède des spécificités qui rendent cette application plus complexe. Contrairement au tennis ou au cricket, où les décisions contestables sont souvent binaires (in/out, touché/non touché), les décisions arbitrales en football sont fréquemment subjectives et interprétatives, comme une faute ou une main. Cela pourrait entraîner des débats prolongés, même après la révision vidéo, et réduire la clarté du processus.
De plus, ces sports se prêtent mieux à des interruptions fréquentes, tandis que le football privilégie la fluidité du jeu. Introduire un système de contestation dans ce contexte nécessitera un ajustement soigneux pour minimiser les perturbations. Enfin, les infrastructures VAR ne sont pas uniformément déployées dans toutes les ligues et compétitions, ce qui pourrait entraîner des inégalités dans l’application de cette règle à l’échelle mondiale.
L’introduction de cette mesure suscite déjà des critiques de la part du grand public, qui redoute des interruptions de jeu plus longues et une réduction supplémentaire de l’aspect humain dans les décisions arbitrales. Par ailleurs, la VAR est initialement conçue pour limiter les contestations en clarifiant les situations litigieuses, ce qui soulève des questions sur la nécessité d’un tel dispositif supplémentaire. Dès lors, il est légitime de s’interroger sur la pertinence de cette nouvelle possibilité de contestation, qui pourrait paradoxalement compliquer l’objectif même d’assistance à l’arbitrage, par l’intervention des entraîneurs. La possibilité pour ces derniers de demander une révision pourrait également être perçue comme une remise en question de l’autorité des arbitres sur le terrain, renforçant une tendance à la judiciarisation des matchs.